Le coronavirus révélateur
Il y a bien des choses qu’une crise, telle que celle que nous vivons, peut révéler. Je me restreindrais à évoquer quelques points relatifs à la formation à distance.
Depuis bien longtemps, pour ma part depuis plus de vingt ans, et j’ai eu de nombreux prédécesseurs et compagnons de route, d’abondantes initiatives en faveur de la formation à distance ont été menées. Face à elles, les contingents de dénigreurs ont certes diminués mais sont restés vigoureux et majoritaires. Non pas tant sur l’idée qu’une partie des formations pouvait être portée à distance, les exemples de classes inversée et de MOOC en sont témoins, mais sur la préparation des organismes de formation, celles des formateurs et enseignants tout comme celle du législateur, des financeurs, des prescripteurs, des acheteurs et des apprenants. Une paille me direz-vous puisque, à bien y réfléchir, c’est l’écrasante majorité des acteurs de la galaxie formation, de goguenards à résistants, qui, traînant des pieds, a voulu se persuader que le présentiel resterait l’alpha et l’oméga d’une vraie formation.
Aujourd’hui, tous confinés, nombreux s’imaginent pouvoir adopter la formation à la distance, comme cela, par la seule force de la nécessité [1]. Ainsi, de ces enseignants universitaires, j’en ai au moins deux exemples de deux universités parisiennes, qui ne pouvant plus exercer leur magistère, font crouler leurs étudiants sous un nombre invraisemblable de devoirs et de travaux collaboratifs sur lesquels ils seront, pour la plupart, bien avares de commentaires. Leur mot d'ordre semblant être "Ne pouvant plus enseigner, j'évalue versus je note !" Mais également de ces formateurs, qui se disent qu’ils auraient bien besoin de maîtriser certains outils comme la classe virtuelle alors que sa prise en main ne demande que quelques heures de formation qu’ils n’ont jamais trouvées. Qui se trouvent démunis lorsqu’il s’agit non plus de transmettre mais de soutenir l’apprentissage, d’investir le tutorat à distance. Du législateur et des financeurs qui en sont encore à demander des preuves de participation. Des apprenants qui découvrent que l’apprentissage est bien plus exigeant que l’écoute distraite des cours magistraux.
Tout ceci est triste mais non fatal. Non fatal, car chacun va vivre, personnellement, durant ce confinement, les conséquences de l’imprévoyance, de la paresse à imaginer d’autres formes de la relation pédagogique. Que cela ne sera pas agréable mais que là encore, l'erreur montrera sa puissance formative.
Non fatal et porteur d’espoir renouvelé car il y aura prise de conscience de l’inadaptation des anciennes méthodes aux défis d’aujourd’hui. Ainsi, de cette enseignante (une de celles de ma fille) qui a produit des podcasts en lieu et place de ses cours magistraux et qui se verra peut-être bien continuer après, pour faire autre chose lors des séances présentielles, et qui réclamera peut-être de substituer des ateliers à ses cours en amphi. Et si, elle n’est pas seule, nous pourrions même voir s’arrêter les chantiers de construction d’amphis (il n'y a que ceux qui n'ont jamais donné de cours en amphi, ou frappés de cécité, qui peuvent les voir comme des espaces de sociabilité et d'apprentissage). De l’espoir au rêve, il n’y a qu’un pas mais n’est-il pas déjà, encore et toujours, temps de rêver ?
« La vie est un rêve, fais-en une réalité » nous a dit Mère Teresa… Et si la déclinaison de cette maxime : « la formation à distance est un rêve, fais-en une réalité » devenait un objectif poursuivi par chaque acteur de la formation...
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[1] Et je ne dis pas qu’il ne faut pas le faire. J’ai même eu l’occasion de proposer un schéma simple de mise à distance d’une journée de formation présentielle https://www.linkedin.com/feed/update/urn:li:activity:6644551952237678592/
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